Yvonne BOVARD

Yvonne BOVARD

1902-1984, violoniste

Née en 1902 à Genève et décédée en 1984 dans cette même ville, Yvonne Bovard est violoniste et militante communiste.

Yvonne Bovard obtient un diplôme du Conservatoire de musique de Genève en 1920 et est second prix de la classe de violon supérieur. Membre du Parti communiste suisse, elle émigre en URSS le 8 mars 1936. Elle y retrouve son mari, le Polonais Mark Schalks, expulsé de Genève suite à la fusillade du 9 novembre 1932 – des militaires tirèrent sur une manifestation antifasciste organisée à Plainpalais – et aux arrestations qui suivirent. Elle travaille au service français de Radio Moscou, entre autres pour une émission enfantine. Dans sa correspondance, elle s’enthousiasme pour les réalisations du système soviétique comme l’absence de hiérarchie au travail, la qualité des services de santé ou la multiplication des crèches.

Selon un témoignage, Yvonne Bovard aurait peu à peu émis des doutes sur le régime en constatant la disparition de nombreuses personnes. Mark Schalks est incarcéré en octobre 1940, pris dans la vague d’arrestations de communistes polonais qui accompagne l’invasion de la Pologne par l’Armée rouge en septembre 1939. Apprenant qu’il a été envoyé en Sibérie, Yvonne Bovard entame des démarches pour rentrer en Suisse. Elle est arrêtée à son tour le 27 novembre 1940, condamnée à huit ans de camps pour activités antisoviétiques. Les motifs précis de sa détention ne sont pas connus. Selon certain.e.s, elle aurait émis des critiques envers Staline, tandis que, selon d’autres, elle aurait été arrêtée dans le sillage de son mari. Yvonne Bovard passe ces huit années dans un camp de femmes affectées au travail du bois situé près de la station de Iaïa sur la ligne du Transsibérien. Une fois sa peine accomplie, elle est maintenue, comme tant d’autres, en relégation. Dès septembre 1948, elle réside et travaille dans la ville de Ienisseïsk. Les diverses tentatives pour la faire libérer depuis la Suisse par l’intermédiaire du Département fédéral des affaires étrangères, de la Croix-Rouge ou de mobilisations publiques – lors desquelles son cas est instrumentalisé à des fins politiques – échouent.

Grâce à l’assouplissement du goulag après la mort de Staline, Yvonne Bovard reçoit, à la fin de l’année 1953, l’autorisation de retourner en Suisse. Sollicitée par des journalistes, interrogée par le service de police du ministère public de la Confédération, elle se refuse à raconter son incarcération ou à renier sa sympathie pour l’URSS. Elle travaille comme bibliothécaire à la Faculté des lettres de l’Université de Genève, gardant le silence sur sa détention jusqu’à son décès en 1984. Elle est réhabilitée par la Russie en 1997.


Biographie : Laure Piguet

Sources
  • « Yvonne Bovard [1935], Mitglied der Kommunistischen Partei der Schweiz (KPS) », in Schweizerisches Sozialarchiv, F Fa-0010-46, F-7000 Sammelbestand Fotografie.
Bibliographie
  • « Fotografie von Yvonne Bovard », in Memorial Fotoarchiv (http://foto-memorial.org/de/node/20192).
  • Künzi, Daniel (avec la collaboration de Thérèse Obrecht), « Requiem pour une violoniste », in Piron, Geneviève (dir.), Goulag. Le peuple des zeks, Gollion, Genève, Infolio, Musée d’ethnographie de Genève, 2004, p. 143-145.
  • Künzi, Daniel (réalisation et production), Yvonne Bovard, déportée en Sibérie, 1998, 61 minutes.

Emplacement temporaire des plaques du Projet 100Elles*

Femme* ayant obtenu un nom de rue officiel

100 Elles* - Le recueil

Retrouvez cette biographie dans le recueil

L’avenue Ruth Bösiger ? La rue Grisélidis Réal ? Ou le boulevard des Trente Immortelles de Genève ? Si ces noms ne vous disent rien, c’est parce que ces rues n’existent pas. Ou pas encore... À Genève, l'Escouade a fait surgir cent femmes* du passé où elles avaient été enfouies, en installant de nouveaux noms de rues dans la ville. Le livre 100Elles*constitue le recueil de ces cent portraits illustrés.

Cent biographies de femmes ayant marqué l'histoire du VIe au XXe siècle pour lutter contre l'effacement des figures féminines de la mémoire collective et les mécanismes patriarcaux de l’historiographie.

Cet ouvrage est le fruit d'un travail collaboratif, local et inclusif. Rédigé par des historiennes de l’Université de Genève et réalisé sous la direction de l’Escouade, il est illustré par dix artistes genevoises, alumnae de la HEAD – Genève, partenaire du projet.

Ouvrage disponible en librairie et sur le site des Editions Georg: https://www.georg.ch/livre-100elles