Marcelle de KENZAC
1919-2009, metteuse en scène
Née Kauffmann le 3 avril 1919 à Genève et décédée le 25 février 2009 dans cette même ville, Marcelle de Kenzac est une personnalité marquante de la scène artistique et culturelle genevoise du XXe siècle, à la fois pianiste, comédienne, metteuse en scène et éditrice.
Née dans une famille d’origine suisse, Marcelle Kauffmann est la fille ainée d’Anna, femme au foyer et dont le nom de naissance n’a, pour l’instant, pas été identifié, et de Charles Kauffmann, homme d’affaires gérant de fortunes familiales. Elle grandit dans le quartier des Délices, dans un appartement situé dans la maison de l’actuel Musée Voltaire, et étudie au Conservatoire de musique de Genève, où elle suit les cours de piano de Marcelle Cheridjian-Charrey.
Diplômée en 1937, Marcelle Kauffmann souhaite mener une carrière de concertiste. Suite au refus opposé par son père, elle décide, à 20 ans, de vivre seule. Pendant plusieurs années, elle se produit comme pianiste et se fait remarquer grâce à sa virtuosité. Une source familiale rapporte qu’elle parvient à convaincre le chef d’orchestre allemand Franz von Hoesslin, installé à Genève après avoir fui le nazisme, de l’aider à perfectionner son jeu, après l’avoir contacté lors d’un concert qui l’avait transportée. Souhaitant également publier ses poésies, elle rencontre l’éditeur Paul-Fabien Perret-Gentil, auteur lui-même et fondateur en 1937 des éditions Perret-Gentil, avec lequel elle se lie d’amitié et finalement se marie en 1951. Aussi indépendante que déterminée, elle devient une concertiste réputée pour ses interprétations et se produit dans les théâtres romands.
Au début des années 1950, Marcelle Kauffmann abandonne brusquement la scène musicale pour se lancer dans la comédie avec le Théâtre de Suisse romande, une compagnie fondée à Genève par Paul-Fabien Perret-Gentil, en choisissant comme nom d’artiste Marcelle de Kenzac. Le 4 décembre 1953, elle ouvre à Lausanne le Théâtre du Petit-Chêne, administré par son mari. Elle en est la directrice, actrice et metteuse en scène principale, avec un répertoire qui va du vaudeville au théâtre contemporain. Elle est notamment saluée pour sa réalisation d’Agnès, adaptation française de Als der Krieg zu Ende war de Max Frisch en 1958, où elle tient aussi le rôle-titre. Après la fermeture de cette scène lausannoise, en avril 1959, elle joue au Théâtre de Poche à Genève, théâtre privé que Paul-Fabien Perret-Gentil a créé en 1948. Marcelle de Kenzac poursuit sa carrière de comédienne et metteuse en scène au nouveau Théâtre de Poche et à la Comédie de Genève, et ce jusqu’en 1973, année où la critique la célèbre pour une nouvelle création mondiale d’Agnès. En vingt ans, elle aura joué ou mis en scène une cinquantaine de pièces.
Suite au décès de son mari la même année, Marcelle de Kenzac décide de reprendre la maison d’édition Perret-Gentil. Elle devient ainsi éditrice, spécialisée dans la publication d’auteur.rice.s romand.e.s. Elle est aussi animatrice d’un cercle littéraire dans la vieille ville, qui se réunit le mardi et qui soutient les artistes de Genève.
Ayant pris sa retraite en 1989, Marcelle de Kenzac revient à ses premiers amours. Elle donne des leçons privées de piano tout en continuant à animer la vie culturelle genevoise. En 2006, elle joue encore le rôle d’une arrière-grand-mère dans le court-métrage de la réalisatrice suisse Floriane Closuit, La clé des champs. Elle fait entendre sa voix dans la vie locale, comme le témoigne sa « dernière lettre », adressée au courrier des lecteurs de la Tribune de Genève, deux jours avant son décès, où elle critique l’actualité politique. Les dernières années de sa vie sont assombries par des difficultés physiques de plus en plus importantes. Ayant décidé de mettre un terme à ses jours avec le soutien de l’association Exit avant d’être affaiblie par les douleurs, Marcelle de Kenzac se donne la mort le 25 février 2009, dans son appartement de Chancy. Elle est enterrée avec Paul-Fabien Perret-Gentil au cimetière des Rois de Genève à Plainpalais, où reposent les personnalités considérées comme ayant marqué la ville.
Biographie : Daniela Solfaroli Camillocci
- Thévoz, Jaqueline, « Marcelle Perret-Gentil de Kenzac », Femmes suisses et le mouvement féministe, vol. 64, no 4, 1976, p. 8.
- Guéniat, Marc, « Elle a choisi l’heure et la date de son départ. C’était hier », Tribune de Genève, 26 février 2009, p. 21.
- Perret-Gentil de Kenzac, Marcelle, « Dernière lettre à ma chère Julie », Tribune de Genève, 4 mars 2009, p. 33.
- Entretien téléphonique avec Anne Kauffmann, journaliste et cousine de Marcelle de Kenzac, Genève, 3 avril 2019.
- Aguet, Joël, « Théâtre du Petit-Chêne, Lausanne VD », in Kotte, Andreas (éd.), Dictionnaire du théâtre en Suisse, vol. 3, Zurich, Chronos, 2005, p. 1923.
- Bouvet, Sophie, « Nouveau Théâtre de Poche, Genève GE », in Kotte, Andreas (éd.), Dictionnaire du théâtre en Suisse, vol. 2, Zurich, Chronos, 2005, p. 1329-1330.
- Johner, Sylvie, « Marcelle de Kenzac », in Kotte, Andreas (éd.), Dictionnaire du théâtre en Suisse, op. cit., p. 987.
- « Paul Fabien Perret-Gentil », in Kotte, Andreas (éd.), Dictionnaire du théâtre en Suisse, op. cit., p. 1392.
- « Marcelle de Kenzac », in Wikipédia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Marcelle_de_Kenzac).