George ELIOT
Portrait de George Eliot vers 1849 peint par François d’Albert-Durade, huile sur toile, National Portrait Gallery, Londres (image provenant de Wikipedia).

George ELIOT

1819-1880, écrivaine

Née le 22 novembre 1819 dans le Warwickshire en Angleterre et décédée le 22 décembre 1880 à Londres, George Eliot, de son vrai nom Mary Ann Evans, est une romancière, poète, journaliste, traductrice et critique de l’époque victorienne.

Issue d’une famille aisée de fermiers, George Eliot est, dès ses 5 ans, éduquée dans divers collèges pour jeunes filles. En 1835, elle doit interrompre ses études et rentre à la maison pour s’occuper de sa mère Christiana Pearson, qui est tombée malade. Suite à sa disparition, elle lui succède dans la gestion du ménage familial, en prenant soin de ses frères et sœurs ainsi que de son père Robert Evans et en poursuivant sa formation à la maison. À partir de 1840, elle fréquente à Coventry les salons intellectuels de milieux politiques libéraux et de libres penseur.seuse.s, comme Charles Bray et l’écrivaine Cara Bray, son épouse. Quand son père décède en mai 1849, Mary Ann Evans a 30 ans. Elle refuse d’aller vivre avec son frère et son épouse et part en voyage en Suisse avec les Bray. Une fois arrivée à Genève, qu’elle dépeignait quelque temps auparavant comme « le genre de ville romantique dans laquelle il serait merveilleux de passer un an, en lisant et en réfléchissant dans un attique », Mary Ann Evans prend la décision d’y séjourner seule. Elle loge quelques semaines dans une pension proche des bâtiments qui aujourd’hui abritent l’Organisation des Nations unies, puis se lie d’amitié avec le couple de peintres Julie et François d’Albert-Durade, qui l’invitent dans leur maison à la rue de la Pélisserie. En mars 1850, après un séjour de près de huit mois à Genève, Mary Ann Evans repart, mais pendant de longues années elle reste en correspondance avec ses amis ; François d’Albert-Durade est, par ailleurs, le principal traducteur français de son œuvre. Dix ans après son voyage, elle reprendra ses souvenirs sur ce séjour genevois décisif dans sa nouvelle, s’inspirant du genre fantastique, The Lifted Veil.

De retour en Angleterre, Mary Ann Evans s’installe à Londres et s’insère dans le monde de la politique et du journalisme ; elle devient la rédactrice de la prestigieuse Westminster Review et se rapproche d’Herbert Spencer, théoricien du darwinisme social. Sa vie personnelle est marquée par des choix qui suscitent alors le scandale. En couple depuis 1854 avec l’écrivain George Henry Lewes, qui est séparé de sa femme, elle ne peut faire ménage commun qu’en abandonnant l’Angleterre pour voyager avec lui en Allemagne. À leur retour, marginalisé.e.s, iels ne peuvent pas s’installer à Londres et déménagent à Richmond. Des années passent avant que le couple ne soit réadmis dans la société londonienne. Mary Ann Evans est désormais une éditrice, critique littéraire et traductrice reconnue. C’est pour protéger sa vie privée et professionnelle que, lorsqu’elle fait paraitre en 1856 ses premières nouvelles, elle choisit un nom de plume masculin, George Eliot. Elle ne veut pas être associée à ses travaux critiques déjà parus et souhaite en outre se distancier du cliché de la littérature « féminine » jugée alors par la critique comme attachée à des sujets sentimentaux ou frivoles, qu’elle-même a d’ailleurs contribué à évaluer sévèrement dans ses articles.

Suite au succès immédiat de son roman Adam Bede en 1859, George Eliot finit par révéler son identité. Cela n’a pas d’impact négatif sur sa carrière d’écrivaine, et durant les vingt ans suivants, elle alterne son abondante activité critique avec la création littéraire, en publiant sous son nom de plume de nombreux romans où elle traite de politique, de religion, et discute de questions sociales ou de genre. Dans son chef-d’œuvre littéraire Middlemarch, elle introduit, par exemple, le thème politique de la modification du système électoral par le Reform Act de 1832. Dans ses romans, elle met en avant des protagonistes déterminées. Ses figures de femmes sont souvent remarquables : intelligentes, fortes et autonomes dans la réalisation de leurs vies parfois à contre-courant, elles luttent contre la violence domestique (Scenes of Clerical Life), ou se battent pour que leurs qualités soient reconnues et leurs choix respectés (The Mill on the Floss).

En 1878, George Henry Lewes décède. En 1880, Mary Ann Evans épouse John Walter Cross, un proche ami, plus jeune de vingt ans – son premier biographe –, avant de mourir la même année d’une infection rénale, âgée de 61 ans.


Biographie : Bianca Cesura, Anne-Lydie Dubois et Daniela Solfaroli Camillocci

Œuvres (sélection)
  • Scenes of Clerical Life, 2 vol., Édimbourg, Londres, William Blackwood & Sons, 1858.
  • Adam Bede, 3 vol., Édimbourg, Londres, William Blackwood & Sons, 1859.
  • « The Lifted Veil », Blackwood’s Edinburgh Magazine, tome 86, no 525, 1859, p. 24-48.
  • The Mill on the Floss, Édimbourg, Londres, William Blackwood & Sons, 1860.
  • Middlemarch. A Study of Provincial Life, 8 vol., Édimbourg, Londres, William Blackwood & Sons, 1871-1872.
Bibliographie
  • Ashton, Rosemary, « Evans, Marian [pseud. George Eliot] (1819-1880) », in Oxford Dictionary of National Biography (https://doi.org/10.1093/ref:odnb/6794).
  • Beer, Gillian, George Eliot, Brighton, The Harvester Press, 1986.
  • Boissonnas, Lucien, « François d’Albert-Durade », in Dictionnaire historique de la Suisse (https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/032507/2002-06-13/).
  • Ozouf, Mona, L’autre George. À la rencontre de George Eliot, Paris, Gallimard, 2018.
  • Rignall, John, Oxford Reader’s Companion to George Eliot, Oxford, Oxford University Press, 2000, p. 212-228.
  • Tayor, Ina, George Eliot. Woman of Contradictions, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1989.

Emplacement temporaire des plaques du Projet 100Elles*

Femme* ayant obtenu un nom de rue officiel

100 Elles* - Le recueil

Retrouvez cette biographie dans le recueil

L’avenue Ruth Bösiger ? La rue Grisélidis Réal ? Ou le boulevard des Trente Immortelles de Genève ? Si ces noms ne vous disent rien, c’est parce que ces rues n’existent pas. Ou pas encore... À Genève, l'Escouade a fait surgir cent femmes* du passé où elles avaient été enfouies, en installant de nouveaux noms de rues dans la ville. Le livre 100Elles*constitue le recueil de ces cent portraits illustrés.

Cent biographies de femmes ayant marqué l'histoire du VIe au XXe siècle pour lutter contre l'effacement des figures féminines de la mémoire collective et les mécanismes patriarcaux de l’historiographie.

Cet ouvrage est le fruit d'un travail collaboratif, local et inclusif. Rédigé par des historiennes de l’Université de Genève et réalisé sous la direction de l’Escouade, il est illustré par dix artistes genevoises, alumnae de la HEAD – Genève, partenaire du projet.

Ouvrage disponible en librairie et sur le site des Editions Georg: https://www.georg.ch/livre-100elles